FR EN
Retour
15 janvier 2018 Actualités PUBLICATIONS

L’étendue de l’obligation d’information et de conseil du notaire à l’égard de son client en matière fiscale

La cour de cassation a le 20 décembre 2017 un arrêt intéressant (Cass. 1re civ., 20 déc. 2017, n° 16-13.073, Publié au bulletin. Lire en ligne : https://www.doctrine.fr/d/CASS/2017/JURITEXT000036344276) sur l’étendue de l’obligation d’information et de conseil du notaire à l’égard de son client en matière fiscale : le notaire doit être très prudent et s’assurer (et de garder la preuve) du caractère précis des informations et conseils qu’il donne à son client en cas de déclarations fiscales erronées de la part de ce dernier, car on sait que la responsabilité professionnelle du notaire peut être engagée lorsque son client subit le coût d’un redressement fiscal dont le fait générateur découle de ses conseils : cet arrêt l’illustre concrètement.

 

Une SCI avait acquis le 21 décembre 2007 un terrain à bâtir pour y faire construire des lots et les vendre à des particuliers ; la SCI céda donc, entre le 25 juillet 2008 et le 23 octobre 2009, cinq lots par le biais d’actes notariés mentionnant que ces mutations entraient dans le champ d’application des droits d’enregistrement (comme étant effectuées au profit d’une personne physique, en vue de la construction d’un immeuble destiné à l’usage d’habitation) alors que, pour l’administration fiscale (qui opéra un redressement de TVA de 47.000 €) la venderesse, qui exerçait une activité habituelle de lotisseur, relevait, par sa structure juridique, de l’impôt sur les sociétés.

En fait, la loi du 9 mars 2010, modifiant les dispositions de l’article 257 du code général des impôts, avait assujetti à la taxation sur la marge des opérations qui n’y étaient pas antérieurement soumises, telles que celles portant sur l’acquisition de terrains par des personnes physiques en vue de la construction d’immeubles par elles affectés à un usage d’habitation…

 

Bien évidemment la SCI n’avait pas pu récupérer ce surcoût de TVA sur les acheteurs des lots, ce qui constituait son préjudice et elle avait donc recherché la responsabilité civile du notaire instrumentaire.

Après avoir été déboutée par la cour de Nîmes qui avait considéré que les déclarations fiscales relevaient de sa seule responsabilité, la SCI obtient la cassation de l’arrêt par la haute cour qui après avoir rappelé que « le notaire est tenu d’informer et d’éclairer les parties, de manière complète et circonstanciée, sur la portée et les effets, notamment quant aux incidences fiscales, de l’acte auquel il prête son concours ». Elle constate qu’en l’espèce, les manquements déclaratifs du vendeur sont consécutifs à une information incomplète délivrée par le notaire sur la fiscalité des mutations en cause. En ne retenant pas la responsabilité du notaire alors qu’il avait commis une faute à l’origine du préjudice dont se prévaut le vendeur, la cour d’appel méritait la censure.

Pour la première chambre civile « le notaire est tenu d’informer et d’éclairer les parties, de manière complète et circonstanciée, sur la portée et les effets, notamment quant aux incidences fiscales, de l’acte auquel il prête son concours » et le fait dommageable est constitué par l’inexécution de cette obligation incombant au notaire.

 

On le sait : le notaire doit informer de façon claire et précise et éclairer son client ; s’il est le seul rédacteur d’un acte, s’assurer que l’ensemble des parties des actes qu’il leur soumet ont bien connaissance de l’ensemble des tenants et aboutissants de ce qu’elles signent (voire, des conséquences qui en découleront pour les tiers) et que les informations fournies sont adaptées au contexte exact dans lequel l’acte s’inscrit.

En l’espèce les incidences fiscales du projet du vendeur auraient dues lui être expliquées, ce qui n’a manifestement pas été le cas.

Le manquement étant consécutif à l’information incomplète du notaire, le fait dommageable était avéré (ça n’est donc pas une simple perte de chance) et le lien de causalité établi : c’est bien le manque de précision dans l’information qui a provoqué la mauvaise déclaration fiscale de la victime.

En matière fiscale, plus que dans toute autre matière, le notaire veillera à bien se ménager la preuve de ce qu’il a bien -et complètement- exercé son devoir de conseil.

 

Retour
PUBLICATIONS 15 janvier 15Actualités

L’étendue de l’obligation d’information et de conseil du notaire à l’égard de son client en matière fiscale

La cour de cassation a le 20 décembre 2017 un arrêt intéressant (Cass. 1re civ., 20 déc. 2017, n° 16-13.073, Publié au bulletin. Lire en ligne : https://www.doctrine.fr/d/CASS/2017/JURITEXT000036344276) sur l’étendue de l’obligation d’information et de conseil du notaire à l’égard de son client en matière fiscale : le notaire doit être très prudent et s’assurer (et de garder la preuve) du caractère précis des informations et conseils qu’il donne à son client en cas de déclarations fiscales erronées de la part de ce dernier, car on sait que la responsabilité professionnelle du notaire peut être engagée lorsque son client subit le coût d’un redressement fiscal dont le fait générateur découle de ses conseils : cet arrêt l’illustre concrètement.

 

Une SCI avait acquis le 21 décembre 2007 un terrain à bâtir pour y faire construire des lots et les vendre à des particuliers ; la SCI céda donc, entre le 25 juillet 2008 et le 23 octobre 2009, cinq lots par le biais d’actes notariés mentionnant que ces mutations entraient dans le champ d’application des droits d’enregistrement (comme étant effectuées au profit d’une personne physique, en vue de la construction d’un immeuble destiné à l’usage d’habitation) alors que, pour l’administration fiscale (qui opéra un redressement de TVA de 47.000 €) la venderesse, qui exerçait une activité habituelle de lotisseur, relevait, par sa structure juridique, de l’impôt sur les sociétés.

En fait, la loi du 9 mars 2010, modifiant les dispositions de l’article 257 du code général des impôts, avait assujetti à la taxation sur la marge des opérations qui n’y étaient pas antérieurement soumises, telles que celles portant sur l’acquisition de terrains par des personnes physiques en vue de la construction d’immeubles par elles affectés à un usage d’habitation…

 

Bien évidemment la SCI n’avait pas pu récupérer ce surcoût de TVA sur les acheteurs des lots, ce qui constituait son préjudice et elle avait donc recherché la responsabilité civile du notaire instrumentaire.

Après avoir été déboutée par la cour de Nîmes qui avait considéré que les déclarations fiscales relevaient de sa seule responsabilité, la SCI obtient la cassation de l’arrêt par la haute cour qui après avoir rappelé que « le notaire est tenu d’informer et d’éclairer les parties, de manière complète et circonstanciée, sur la portée et les effets, notamment quant aux incidences fiscales, de l’acte auquel il prête son concours ». Elle constate qu’en l’espèce, les manquements déclaratifs du vendeur sont consécutifs à une information incomplète délivrée par le notaire sur la fiscalité des mutations en cause. En ne retenant pas la responsabilité du notaire alors qu’il avait commis une faute à l’origine du préjudice dont se prévaut le vendeur, la cour d’appel méritait la censure.

Pour la première chambre civile « le notaire est tenu d’informer et d’éclairer les parties, de manière complète et circonstanciée, sur la portée et les effets, notamment quant aux incidences fiscales, de l’acte auquel il prête son concours » et le fait dommageable est constitué par l’inexécution de cette obligation incombant au notaire.

 

On le sait : le notaire doit informer de façon claire et précise et éclairer son client ; s’il est le seul rédacteur d’un acte, s’assurer que l’ensemble des parties des actes qu’il leur soumet ont bien connaissance de l’ensemble des tenants et aboutissants de ce qu’elles signent (voire, des conséquences qui en découleront pour les tiers) et que les informations fournies sont adaptées au contexte exact dans lequel l’acte s’inscrit.

En l’espèce les incidences fiscales du projet du vendeur auraient dues lui être expliquées, ce qui n’a manifestement pas été le cas.

Le manquement étant consécutif à l’information incomplète du notaire, le fait dommageable était avéré (ça n’est donc pas une simple perte de chance) et le lien de causalité établi : c’est bien le manque de précision dans l’information qui a provoqué la mauvaise déclaration fiscale de la victime.

En matière fiscale, plus que dans toute autre matière, le notaire veillera à bien se ménager la preuve de ce qu’il a bien -et complètement- exercé son devoir de conseil.