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12 septembre 2016 Actualités PUBLICATIONS

« Quelle place pour l’avocat au sein du nouveau Palais de Justice de Paris ? »

A l’heure où les relations entre magistrats et avocats sont sous tension, ainsi qu’en témoigne le rapport relatif à la protection des magistrats remis au garde des Sceaux le 28 mars dernier, qui accuse la défense de vouloir déstabiliser les juges(1), les avocats s’interrogent : quelle place leur sera réservée au sein du nouveau Palais de Justice de Paris ?

La tour conçue par l’architecte Renzo Piano se présente comme un endroit ouvert,  « dédramatisé »(2),  le lieu, par excellence, de la civitas, en rupture avec I’« architecture de la peur »(3) que symbolisaient les marches du Palais et le labyrinthe de l’île de la Cité dans le­quel le citoyen, inmanquablement, se perdait.

Désormais, le justiciable devrait s’y retrouver : marqueurs au sol et sur les murs « à hauteur d’homme », Jean-Michel Hayat, actuel président du TGI de Paris, se félicite déjà de sa « signalétique digne d’un aéroport international ».(4)

 Plus accessible, le nouveau Palais de Justice ambitionne aussi d’être plus transparent. Le verre serait un remède à la perte de confiance dans les institutions et confèrerait à la justice une « poétique de la légèreté ».(5)

 Mais la sécurité reste, pour les concepteurs du projet, une préoccupation. Les avocats risquent ainsi de se voir refouler des bureaux des magistrats, au mépris de la justice collaborative que l’on dit tant favoriser. En effet, les salles d’audience seront en accès libre tandis que l’accès aux bureaux des juges, dans les étages supérieurs, imposera de « badger » et il n’est, ac­tuellement, pas prévu que les avocats soient équipés de badges(6).

Il faut dire que la fermeture des lieux de justice aux avocats est à la mode : Pontoise, Grenoble, Lyon, Nantes, Mar­seille ont expérimenté ces contrôles qui rendent difficile le passage au cabinet d’un juge(7). À Paris, l’accès au Palais par le 36 quai des Orfèvres vient de leur être interdit. Alors, « veut-on faire de nos palais des maisons closes ? Closes de portes, closes de portiques, closes d’accès restreint, closes de badges magnétiques. »(8)

 Personae non gratae dans l’enceinte de la future cité judiciaire, la nouvelle Maison de l’Ordre des avocats sera même installée à l’écart, sur le parvis. Les avocats n’ont plus que quelques mois pour faire entendre leur voix : le démé­nagement est prévu en juin 2017.

  1.  Rapport du groupe de travail relatif à la protection des magistrats, remis au garde des Sceaux le 28 juin 2016 ;
  2. Rapport du groupe de réflexion sur la symbolique du futur tribunal de Paris, juin 2016 ;
  3. lbid ;
  4. Neuer, « Comment le nouveau tribunal de Paris va révolutionner les relations citoyen-justice ”, Le Point, 13 juin 2016 ;
  5. Rapport du groupe de réflexion sur la symbolique du futur tribunal de Paris, juin 2016 ;
  6. Dufour, « Le palais de justice des Batignolles sort enfin de terre >›, Gaz. Pal., 4 avril 2015 ;
  7. Tcholakian, « Insécurité et palais de justice », Avocats & droit n° 16, 13 avril 2006 ;
  8. Portmann, « Fermeture du 36, quai des Orfèvres aux avocats : « C’est le palais de justice, pas le palais de police ›, Dalloz actualité, 15 juin 2016.

Article d’Antoine CHATAIN paru dans la revue LJA – 12 septembre 2016

Voir l’article

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PUBLICATIONS 12 septembre 12Actualités

« Quelle place pour l’avocat au sein du nouveau Palais de Justice de Paris ? »

A l’heure où les relations entre magistrats et avocats sont sous tension, ainsi qu’en témoigne le rapport relatif à la protection des magistrats remis au garde des Sceaux le 28 mars dernier, qui accuse la défense de vouloir déstabiliser les juges(1), les avocats s’interrogent : quelle place leur sera réservée au sein du nouveau Palais de Justice de Paris ?

La tour conçue par l’architecte Renzo Piano se présente comme un endroit ouvert,  « dédramatisé »(2),  le lieu, par excellence, de la civitas, en rupture avec I’« architecture de la peur »(3) que symbolisaient les marches du Palais et le labyrinthe de l’île de la Cité dans le­quel le citoyen, inmanquablement, se perdait.

Désormais, le justiciable devrait s’y retrouver : marqueurs au sol et sur les murs « à hauteur d’homme », Jean-Michel Hayat, actuel président du TGI de Paris, se félicite déjà de sa « signalétique digne d’un aéroport international ».(4)

 Plus accessible, le nouveau Palais de Justice ambitionne aussi d’être plus transparent. Le verre serait un remède à la perte de confiance dans les institutions et confèrerait à la justice une « poétique de la légèreté ».(5)

 Mais la sécurité reste, pour les concepteurs du projet, une préoccupation. Les avocats risquent ainsi de se voir refouler des bureaux des magistrats, au mépris de la justice collaborative que l’on dit tant favoriser. En effet, les salles d’audience seront en accès libre tandis que l’accès aux bureaux des juges, dans les étages supérieurs, imposera de « badger » et il n’est, ac­tuellement, pas prévu que les avocats soient équipés de badges(6).

Il faut dire que la fermeture des lieux de justice aux avocats est à la mode : Pontoise, Grenoble, Lyon, Nantes, Mar­seille ont expérimenté ces contrôles qui rendent difficile le passage au cabinet d’un juge(7). À Paris, l’accès au Palais par le 36 quai des Orfèvres vient de leur être interdit. Alors, « veut-on faire de nos palais des maisons closes ? Closes de portes, closes de portiques, closes d’accès restreint, closes de badges magnétiques. »(8)

 Personae non gratae dans l’enceinte de la future cité judiciaire, la nouvelle Maison de l’Ordre des avocats sera même installée à l’écart, sur le parvis. Les avocats n’ont plus que quelques mois pour faire entendre leur voix : le démé­nagement est prévu en juin 2017.

  1.  Rapport du groupe de travail relatif à la protection des magistrats, remis au garde des Sceaux le 28 juin 2016 ;
  2. Rapport du groupe de réflexion sur la symbolique du futur tribunal de Paris, juin 2016 ;
  3. lbid ;
  4. Neuer, « Comment le nouveau tribunal de Paris va révolutionner les relations citoyen-justice ”, Le Point, 13 juin 2016 ;
  5. Rapport du groupe de réflexion sur la symbolique du futur tribunal de Paris, juin 2016 ;
  6. Dufour, « Le palais de justice des Batignolles sort enfin de terre >›, Gaz. Pal., 4 avril 2015 ;
  7. Tcholakian, « Insécurité et palais de justice », Avocats & droit n° 16, 13 avril 2006 ;
  8. Portmann, « Fermeture du 36, quai des Orfèvres aux avocats : « C’est le palais de justice, pas le palais de police ›, Dalloz actualité, 15 juin 2016.

Article d’Antoine CHATAIN paru dans la revue LJA – 12 septembre 2016

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